- le cinéma-théâtre Les Nouveautés


PRÉAMBULE

Notre nouvelle rubrique consacrée aux vieux cinémas de Brive n'a pas pour ambition de raconter de façon exhaustive l'histoire des cinémas de la ville. Nous nous contenterons pour les principaux d'entre eux, d'une évocation qui restera incomplète, écrite à partir de documents anciens que nous avons retrouvés dans les dépôts d'archives, documents bien souvent oubliés ou inconnus. De nombreux fac-similés et des photographies viendront illustrer notre texte.
Les services où nous avons puisé la matière à nos sujets sont :
- Le Service de l'Inventaire et du Patrimoine culturel de la Région Limousin;
- Le Musée Labenche d'Art et d'Histoire;
- Les Archives municipales de Brive;
- Les Archives départementales à Tulle.

A raison d'une salle tous les trois mois, nous évoquerons donc, dans l'ordre et de façon plus ou moins détaillée :
- Le Cinéma-théâtre Les Nouveautés;
- Le Sélect, Cinéma Familial;
- Le Rex;
- L'Estavel-cinéma, dont plus personne ne se souvient;
- Et en quelques lignes seulement, tous les autres, à savoir Le Splendid, Le Club, Rupin-Mage et le cinéma de la caserne Brune.

N'hésitez pas à nous faire part des documents que vous pourriez posséder et qui pourraient compléter nos évocations de façon heureuse.



                                                                  Le programme des cinémas de Brive des 25 et 26 février 1939   ===>
                                                                  (cliquez sur l'image pour l'agrandir)
 
                                                  (Journal La République n° 7588 du 25-2-1939 -
                                                                   Doc. Archives Départementales de la Corrèze - cote 62Pr 46)

Le cinéma-théâtre Les Nouveautés reste très présent dans le souvenir de bon nombre des plus anciens de nos visiteurs. Le célèbre écrivain briviste Michel Peyramaure en a brillamment parlé dans ses ouvrages "Un monde à sauver" (1996) et "Brive, un art de Vivre" (2013). Il l'avait aussi évoqué, alors qu'il était encore journaliste, dans un grand article publié dans le quotidien pour lequel il travaillait.
Roger Mendés, auteur de "Brive du V° siècle à nos jours"  lui avait de son côté consacré quelques lignes en 1980, à la page 100 de son ouvrage où il publie aussi deux intéressantes photographies.

Un nom reste attaché au cinéma-théâtre des Nouveautés, celui de Monsieur H. Serre, dit "le père Serre", qui en fut non pas le constructeur, mais en devint très rapidement directeur et propriétaire, et ce jusqu'à la fin de l'exploitation de l'établissement. Il était implanté dans le quartier des Récollets, plus précisément dans la petite rue Regnard, parallèle à la rue de l'Hôtel de Ville dans sa partie centrale.

(Doc. Archives municipales de Brive - cliché anonyme - cote 1S 4-43)
Le quartier des Récollets vers 1900, avant la construction des Nouveautés : impossible de s'y retrouver !
Repérez quand même la tour, nous allons en reparler.


C'est en1913 que l'établissement fut construit, imbriqué dans les vieux bâtiments du quartier. La salle au début, raconte Michel Peyramaure, servait "pour des bals, des séances de patins à roulette ou de théâtre donné par une troupe locale : la Renaissance, dont les vedettes s'appelaient Alfred Fontauzard, chansonnier, Pol'Issier, tourlourou et Albert Flaquières, dit Fla-Fla, qui avait un répertoire de chansons comiques". Notons en passant que c'est ce dernier que l'on retrouvera plus tard comme patron du café-bar-tabacs Le Gambetta, dans la rue du même nom.
Et puis vint le cinéma, muet, bien sûr, pour commencer.

Feuilletons ensemble l'album d'images que nous avons reconstitué.

© Collection du Musée Labenche - Ville de Brive - Cliché J-B. Beynié - Numéro d'inventaire 2000.3.23

C'est la plus ancienne photographie des Nouveautés que nous avons recueillie : on y voit, sur plaque de verre, le cinéma tel qu'il était à l'origine, appuyé contre cette tour d'escalier, seul reliquat de l'immeuble détruit pour permettre sa construction.
Il n'a encore qu'un seul étage.

<=== © RÉGION LIMOUSIN. Service de l’inventaire et du patrimoine culturel.
Cliché Alain Chambaretaud 1982. Autorisation du 16-10-2014.


























© RÉGION LIMOUSIN. Service de l’inventaire et du patrimoine
culturel Cliché Philippe Rivière 1992. Autorisation du 16-10-2014. ===>


Ici, la tour d'escalier a été détruite (on en devine juste ses attaches), et un étage a été construit, pas de façon très esthétique, d'ailleurs. A l'angle, un escalier métallique : l'issue de secours enfin construite pour les spectateurs du balcon.

Depuis la construction de l'étage, des balcons et des loges, l'intérieur de la salle a l'aspect ci-dessous. La photo est prise depuis la scène.


© Collection du Musée Labenche - Ville de Brive - Cliché J-B. Beynié - Numéro d'inventaire 2000.3.24

La commission communale de Sécurité qui l'a visité le 23 juillet 1947 en donne la description suivante :
"La salle de spectacle se compose d'un rez-de-chaussée et d'un balcon [...]. On accède au cinéma par une porte principale s'ouvrant sur le hall. La salle de spectacle se trouve située à gauche de ce hall. L'accès au balcon se fait au moyen d'un escalier de bois, et le public doit traverser, avant d'y arriver, les appartements particuliers de Mr le Directeur. La cabine de l'opérateur est installée à même la salle de spectacle et au rez-de-chaussée".
On lit plus loin : "L'établissement ne dispose d'aucun moyen efficace de protection contre l'incendie. Sur la scène, coté gauche, se trouve un poste d'eau dont l'arrivée est d'un diamètre bien inférieur à celui normal d'un tube d'incendie, et qui pratiquement ne sert à rien. L'évacuation des personnes pose un problème délicat, surtout en ce qui concerne les personnes installées au balcon. Pour ce qui est du rez-de-chaussée, la salle est aménagée avec trois sorties de secours ouvertes sur le hall, ainsi que trois autres sorties donnant directement sur la rue".
Le nombre de spectateurs pouvant être reçus est évalué à 350 : 240 en rez-de-chaussée et 110 aux balcons. Mais sur son papier à en-tête, le père Serre annonce : "600 places environ".

Un angle du papier à en-tête des Nouveautés (Doc. Archives municipales de Brive - cote 1 I 101)

Il est vrai que le nombre de personnes accueillies était à géométrie variable. En cas d'afflux de spectateurs, des chaises étaient rajoutées un peu partout, jusque dans les portes d'entrée et devant les sorties de secours. Ce qui vaudra au propriétaire de nombreux rappels et mises en demeure de la part du maire de l'époque, Henri Chapelle, à la suite des visites d'inspection de la commission communale de Sécurité, qu'il diligentait régulièrement sur place.

Une feuille de location, pas très ancienne d'ailleurs, nous permet de visualiser la disposition des fauteuils, dans la salle et aux balcons. Les loges sont au premier plan, à droite et à gauche.

(Doc. Archives municipales de Brive - cote 1 I 101)


La porte d'entrée principale qui semble avoir été à l'origine à l'angle du bâtiment, se retrouve plus tard rue Regnard. La voici, ainsi que le petit balcon qui la surplombe :

<=== © RÉGION LIMOUSIN. Service de l’inventaire et du patrimoine culturel.
Cliché Philippe Rivière 1992. Autorisation du 16-10-2014.


              

                        © RÉGION LIMOUSIN. Service de l’inventaire et du patrimoine culturel.
                                               Cliché Philippe Rivière 1992. Autorisation du 16-10-2014.

 

Et puis, un soir de 1980... "c'était sa dernière séquence, c'était sa dernière séance et le rideau sur l'écran est tombé" (Eddy Mitchell).
Notre dernière photographie sera donc une vue de la scène et de son rideau baissé, alors que la salle était déjà désaffectée et vouée à la destruction. Ce sera chose faite en 1994.

Vue rapprochée de la scène. © RÉGION LIMOUSIN. Service de l’inventaire et du patrimoine culturel.
Cliché Philippe Rivière 1992. Autorisation du 16-10-2014.

Pour terminer cette évocation nous allons reprendre quelques souvenirs de Michel Peyramaure, tels qu'il les livre dans "Brive, un art de Vivre" :

"Une sonnerie extérieure avertissait les gens du quartier de l'imminence des projections. Le patron, le père Serre, se tenait assis sur une chaise, à même le trottoir, coiffé d'un chapeau de western, cigare au bec, pour encaisser les entrées, avec un tarif de faveur pour les jeunes. Par mesure de salubrité, il parcourait l'allée centrale armé d'un flytox. Je me souviens l'avoir entendu durant la projection de Ben-Hur (version muette des années trente), secouer les chaînes des esclaves derrière l'écran et scander à coups de pied le rythme des galères, tandis que le pianiste, M. Anis, créait au piano une ambiance sonore du meilleur aloi. Lorsque le projecteur tombait en panne, le père Serre montait sur scène pour raconter la fin du film".

Du vécu !

GRAVE OUBLI : nous avons omis de parler des puces qui, parait-il, envahissaient très régulièrement l'établissement. D'où les pulvérisations de Flytox que faisait généreusement le propriétaire du lieu, en début de séance !


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