- la grotte/tombeau des Perrières

En ouverture de son ouvrage "Brive du V° siècle à nos jours" publié en 1980 aux Presses du Monteil à Peyssac, Roger Mendès propose à ses lecteurs une promenade dans Brive. En arrivant par le récit au bout de l'avenue Émile Zola, il écrit, de façon plutôt imprécise :
"... nous allons passer sous le pont de chemin de fer (Pont de la Croix-Saint-Jacques). En face est la rue Chardin au bout de laquelle il y avait le tombeau d'une grande famille dont le nom m'échappe, dans une grotte fermée par une porte en fer portant des inscriptions citant les noms de cette famille. On distinguait une dizaine de cercueils alignés. De nos jours, avec les constructions faites dans ce quartier, il est fort possible que ce tombeau soit muré".

Hors Roger Mendès, aucun auteur, aucun historien local ne semble avoir évoqué ce mystérieux tombeau. Il n'a certes rien d'historique ou d'artistique. Mais c'est quand même une curiosité dans la ville de Brive.
Au cours de ses promenades dans Brive, notre complice M. V. l'a retrouvé : il se situe maintenant dans l'enceinte du Parc des Perrières, mais tout à fait en lisière, au lieu-dit d'autrefois La Borie. Pour le voir, il vaut mieux ne pas suivre les indications de Roger Mendès, qui ne sont plus au goût du jour.

Après avoir passé sous le pont en venant de la ville, tournez plutôt à droite (avenue Jean-Jacques Rousseau) et prenez ensuite la première rue à gauche : c'est la rue Louis Plantadis.
Vous la suivez jusqu'à son extrémité et vous stationnez sur le deuxième parking public que vous rencontrez. De l'autre coté de la rue, juste en dessous de la maison du gardien du parc, un petit sentier grimpe dans les bois. A quelques 50 mètres seulement, derrière un gros rocher, la grotte que vous recherchez est là.

















(Clichés JPC - 6 juin 2016)

Dans le fond une ouverture béante attire le curieux. De part et d'autre, le rocher a été taillé de manière à ce qu'on puisse y déposer des croix, des vases, des céramiques, ou bien des couronnes en perles de verre montées sur fil de fer, comme cela se faisait dans le temps.
Passons l'ouverture, vestige d'une porte dont seuls subsistent les montants rongés à cœur par la rouille. Nous descendons quelques marches, elles aussi taillées dans la pierre : il fait très sombre, et il vaut mieux être muni d'une lampe. Nous sommes maintenant dans le tombeau. Sur la paroi du fond, face à l'ouverture, une longue inscription a été gravée :

"Ce caveau a été établi par moi, Louis Bonnay, architecte, pour répondre au désir si souvent exprimé de mon père, Pierre Bonnay, entrepreneur, de reposer après sa mort dans cette grotte. Je supplie mon fils bien aimé et après lui les chefs de notre famille de conserver religieusement intacte et sans l'agrandir cette petite propriété de La Borie afin que ce caveau serve éternellement si cela est possible de lieu de sépulture aux nôtres - Octobre 1882"

(Cliché J. N. - 31 mars 2016)

Il n'y a plus de cercueils. Mais au sol subsistent des rails métalliques qui permettaient de les déposer sans qu'ils risquent d'être détériorés par l'humidité.
D'autres inscriptions ont été ajoutées sur les parois latérales :
















(Clichés JPC - 6 juin 2016)

A gauche : "Ont également participé à ce pieux hommage rendu à la mémoire de mon père : ma mère Marie Bonnay, mon frère Eugène Bonnay, ma grand-mère Marguerite Renaud, mon épouse Marthe Bonnay - Octobre 1882"
A droite : "Vous êtes juste, Seigneur, et vos jugements sont droits. Veuillez donner à mes chers morts auprès de vous le repos éternel.   L B  juillet 1888"
Cette dernière inscription doit correspondre au décès en 1887 de deux jeunes enfants de Louis Bonnay, à quelques semaines d'intervalle.

















(Clichés JPC - 6 juin 2016)

Dans un angle du tombeau gisait au sol la plaque qui constituait une partie de la porte d'accès : nous l'avons relevée pour la photographier.

(Cliché JPC - 6 juin 2016)

Notre incursion dans le tombeau nous a donc permis de connaître le nom de celui qui fut son premier locataire, Pierre Bonnay. Entrepreneur en menuiserie, il serait né en 1820 et décédé en 1880.

Son fils Louis-Antoine Bonnay, dit Louis Bonnay, qui l'a fait construire, était né à Brive en 1851 et décédé dans notre ville en 1920. Ce fut à son époque un personnage fort connu : architecte, et en particulier architecte de la ville de Brive pendant un temps (avant un grave différent avec la municipalité au sujet de la construction du "nouveau collège", différent qui mènera les deux parties jusqu'au procès), architecte des monuments historiques, Inspecteur des monuments historiques pour le Lot, la Corrèze et le Tarn-et-Garonne, ... A Brive, il fut à l'origine de nombreux bâtiments construits dans la cité, dont l'église Saint Sernin de l'avenue de la Gare ou encore la fontaine Bourzat. On lui doit aussi maints travaux de restauration d'édifices religieux en Corrèze et dans le Cantal.
Il a eu au moins quatre enfants dont deux sont morts très jeunes.

Louis-Antoine Bonnay dans la base de généalogie Beaugerie-Lafay (lafayf)
sur le site geneanet.com  (donnée non vérifiée par nos soins)   ===>


Par contre, nous n'avons aucune information sur les conditions dans lesquelles le tombeau des Perrières a été désaffecté, en dépit du souhait de Pierre et Louis Bonnay. Des considérations de salubrité et d'hygiène publiques ont certainement été à l'origine de la décision.

Actuellement ouvert à tous vents, les cannettes et les emballages de boissons qui jonchent le sol montrent qu'il est encore (bien) fréquenté.




La sortie du tombeau vue depuis l'intérieur, au bas des marches.
Les petits papiers blancs que l'on voit montrent que l'endroit sert aussi de toilettes publiques :
attention où vous mettez les pieds !
(Cliché JPC - 6 juin 2016)

Une dernière information : sur quelques bases de généalogie des descendants de la famille Bonnay que nous avons consultées, ce lieu unique de sépultures est désigné sous le nom de "cimetière de la Gare", une façon sans doute de le localiser de façon approximative : la gare du chemin de fer n'est en effet pas très éloignée. Mais il n'y apparait aucune mention de la désaffectation du caveau.


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